Il n’est pas blond aux yeux bleus. Et il porte même le nom d’un colonel de l’armée rouge.
Mais Dimitrij OVTCHAROV est pourtant allemand. Et même tatoué 100% teuton: carré, précis, puissant, intraitable. Presqu’imbattable même depuis quelques mois.
Enchaînant une victoire en Coupe du Monde à Liège le mois dernier contre son compatriote Timo BOLL. Puis l’Open d’Allemagne ce week-end. Un open platinum, quasi plus relevé qu’un championnat du monde. Dans lequel il aura ciré rien moins que deux joueurs chinois : Yan AN 4/1 en 1/8ème de finale, puis surtout Fan ZHENDONG 4/3 en ½ finale au terme d’un match épique. Avant de faire plier une nouvelle fois l’inoxydable Timo BOLL en finale.
La routine du champion désormais pour OVTCHAROV.
Et pourtant sa destinée aurait pu être toute autre.
Car sa biographie officielle le fait naitre le 8 septembre 1988 à Kiev. Mais dès sa naissance, il est arraché à ses parents, et jeté dans une fosse. Au milieu de plusieurs pitbulls. Tu te demandes comment s’effectue la sélection naturelle des minots, aptes au fight et au combat, en Ukraine. Voilà…Maintenant tu sais.
Sorti victorieux, il se retrouve direct enchaîné au bout d’une rampe de bois. Contraint pendant des années de faire tourner, en plein désert, dans le vent et le froid, une énorme roue de pierre. Mais c’est un cimmérien. Il ne pleure pas. Ses camarades pleurent pour lui.
Mental et physique forgés, un entraineur ukraino-germanique, Kivolanof WOLABEUF, passé par hasard, détecte son énorme potentiel. Et lui colle une raquette de ping dans la main. L’idée de génie... C’est alors la répétition interminable et ébouriffante des séances d’entrainements martiales et germaniques. Au rythme des opéras de WAGNER. Enchaînant les paniers de 3000 balles, et ne s’arrêtant que quand les balles sont toutes pétées. Les déplacements essuie-glaces avec des boulets de 10 kg aux pieds. Les rallyes tops sur tops avec les quatre murs de la salle. Les séances de services-remises avec un distributeur automatique. Mais de balles en uranium enrichi. De cinq heures à minuit. Puis footing et muscu jusque deux heures du mat...
Après ses séances, pour se requinquer et se régénérer Dimitrij se baigne nu dans le Rhin. Et débriefe ses séances avec la Lorelei. On lui injecte de l’adamentium dans le squelette. Il ne connait plus ni le froid, ni la faim, ni la fatigue. Devenant au terme de cet entraînement inhumain un héros invincible, le warrior ultime.
Avec comme résultats, un palmarès déjà inouï : champion d’Europe 2013 et 2015, vice-champion du monde par équipes 2010 et 2012, vice champion olympique par équipes en 2008, médaille de bronze en simple olympique en 2012…
Alors oui, Dimitrij OVTCHAROV c’est un physique. Un torse en V élargi, presque en W en fait, une ceinture abdominale en acier de la Ruhr, des cuisses de taureau, un mental de crocodile, et l’engagement d’un tigre.
C’et un monstre et un bourreau de travail. En fait, c’est un monstre et un bourreau tout court. Il est là pour faire mal. Pour détruire. Il a compris que ce qui était bien dans la vie, c’était d’écraser ses adversaires. De se délecter à les regarder mourir. Lentement. Puis d’écouter les pleurs et les lamentations de leurs femmes et de leurs enfants...
Donc il commence par super-bien servir. Avec un engagement revers esthétique, original, et ultra efficace : court/long, lifté/coupé, rapide, c’est l’enfer, tu ne sais jamais, sauf quand la balle a plongé bas du filet, où alors est sortie de la table. Si par hasard tu as retourné sur la table, il t’emmanche avec un top-revers, lourd comme 50 kilos de Kartoffel. Et si par miracle tu retouches la balle, une fois l’échange lancé, il repart sur tout. Il tope au rebond du rebond. Ou alors recule à un mètre de la table, et envoie de la choucroute coup droit, ou de la saucisse revers. Il met un impact supplémentaire sur tout ce qui traîne : ça tape fort ? il retape encore plus fort. Tu lui rentres dedans ? Il te reboxe. Et saoule de coups tous ses adversaires. Avec lui tu voudrais prendre temps mort à chaque point. Dimitrij c’est à lui seul une arme de destruction massive. Et en plus, tout est sous contrôle. Car il le sait, sans maîtrise, la puissance n’est rien.
Alors oui, on entend déjà les rageux, énervés par ses petits cris de vierge effarouchée, durant et à la fin des échanges. Sa poussette revers de grand-père, niveau départementale 4. Et son lancer de service marteau coup droit. Certes il jette la balle depuis le centre de la table, mais la retouche, à la descente, à côté du marqueur de la chaise d’arbitre.
Mais il est Dimitrij OVTCHAROV, le tsar allemand. Il a tous les droits. Et on doit tout lui pardonner.
Rien n’arrive toutefois comme ça, par hasard. Dimitrij ne vit et ne pense que tennis de table. Il déjeune ping-pong, dîne ping-pong, soupe ping-pong. Et dort ping-pong… Merci madame OVTCHAROV. Car oui, en plus, pour les gros jaloux, monsieur OVCHTAROV épouse une suédoise, blonde aux yeux bleus. Bonne joueuse et amatrice de ping. Il a vraiment trop de la chance…
Sauf qu’au ping, la chance ça n’existe pas. Et Dimitrij travaille tous les jours du calendrier teutonique pour ça. Il s’est sculpté un corps d’athlète. Et finalement, grâce à lui et à Fan ZHENDONG, le ping-pong peut enfin passer pour un vrai sport. Avec du physique, de l’engagement, et de la violence à l’état brut : Bruno PARIETTI likes this. Challenge quand même pas évident car dans le même temps, un petit puceau japonais imberbe de 12 ans vient d’entrer dans le top 20 mondial. Et un dandy biélorusse de 75 ans y campe toujours…
Mais pas grave, en attendant Dimitrij fait rouler ses pectoraux, et enquille les victoires de rang et les titres.
Gary LINEKER avait déjà annoncé que le foot était un sport qui se joue à onze, et qu’au coup de sifflet final, ce sont toujours les allemands qui gagnent. Depuis la fissure de la muraille de Chine, et le coup de fringale des MA LONG et consorts ces derniers mois, le ping-pong ça commence à ressembler à ça aussi.
Pour notre plus grand bonheur. En tout cas dans la province de Hérain, jumelée depuis 1962 avec le Land de Herein.
Viele Glück für die Zukunft Dimitrij !