Oui, Jan-Ove, The Greatest Of All Time.
Certes les contradicteurs et pisse-froids vont argumenter qu’il y a eu de très grands joueurs avant. Qu’il y en a actuellement, et qu’il y en aura forcément après. Que certains pongistes ont eu, ont, ou auront, des palmarès supérieurs (mais, NDLR : ils ne seront pas bien nombreux !!!).
Quoi qu’il arrive Jan-Owe restera pour toujours, et à jamais, AU DESSUS !
Pour de multiples raisons. Déjà parce qu’on l’a décidé. Et puis par sa précocité, son toucher de balle, sa créativité. Parce qu’il aura été l’un des porte-étendards du ping moderne, et qu’il l’aura emmené dans une autre dimension. Car il porte aussi en lui, et avec lui, la nostalgie d’une époque adolescente, et révolue. Avec les sets de 21 points, les balles de 38, la colle rapide, les services avec le bras devant…
Mais tout ça au bout du compte c’est littérature : il aura vécu et traversé la fin du XXème siècle, le passage aux sets de 11 points, aux balles de 40, et l’arrivée des billes plastiques avec la nonchalance et la décontraction d’un gentleman-farmer suédois. Il pouvait tout jouer, et avec tout, n’importe où, n’importe comment. Y compris avec des boîtes de CD, des bouquins, des boîtes de Snus …et même des bananes : https://www.youtube.com/watch?v=Ed9eL1VPiiM
Parce qu’en fait, ce qui compte au final pour Jan-Ove, c’est le jeu. C’est jouer.
Et c’est bien là ce qui a toujours été l’essentiel. Son essentiel.
Jan-Ove WALDNER naît le 3 septembre 1965 à Stockholm, en Suédie. Mais dans une étable, entre un âne et un boeuf. Marie, sa mère, l’inscrit dès ses 5 ans dans le club de tennis de table de Spårvägen BTK. Joseph, son père, charpentier et menuisier de formation, lui fabriquera sa première raquette, et la table sur laquelle il débutera, dans son garage. Marie, Joseph, l’étable... Tu pourrais croire que Jan-Ove est le fils de DIEU. Mais non, c’est raté : il est DIEU, lui-même !
Dès les premières balles tapées, JO WALDNER fait montre d’une aisance incroyable. La raquette n’est pas le prolongement de sa main. Elle est sa main.
Il sera rapidement comparé à MOZART. Ce qui est complètement stupide car l’Autrichien n’a jamais pu enchaîner deux tops, et a toujours été nul au ping !
Non, restons rationnels. L’explication des qualités de Jan-Ove est toute simple. Tout le monde sait que les Dieux de l’Olympe descendent parfois sur terre, et prennent forme humaine pour se mêler au peuple. De temps en temps pour faire la guerre, ou pour boire une bière. Mais en fait, le plus souvent, surtout pour niquer. ZEUS a donc choisi l’enveloppe corporelle de Jan-Ove, juste pour se divertir et jouer au ping. Entre deux bastons avec CRONOS.
Dès sa prime enfance le petit WALDNER châtie tout le monde. Rapidement propulsé en équipe nationale suédoise, il glane les titres de vice champion d’Europe cadets en 1979 et 1980, puis de champion d’Europe junior, avec la triple couronne (forcément suédoise) en 1981, 1982 et 1983. Il dispute surtout sa première finale des championnats d’Europe sénior à seulement 16 ans, en 1982, contre son frère d’arme et mentor Mikael APPELGREN. Montrant à tous, que même au ping, la valeur n’attend pas le nombre des années. Et devenant instantanément l’idole de moult jeunes apprentis pongistes.
S’en suivra une carrière exceptionnelle. Un bâtiment entier de la SVERIGES RIKSBANK, à Göteborg, sur quatre étages, renferme toutes ses coupes, médailles, et trophées. Presque toujours en or. Rarement en argent.
Relit le palmarès (cligne des yeux maintenant, car dans quelques lignes ça va piquer):
- une médaille d’or aux Jeux Olympiques de Barcelone en 1992, et une médaille d’argent en 2000 aux JO de Sydney ;
- deux titres de champion du monde en simples (1989, 1997), trois titres de vice-champion du monde en simples (1987, 1991, 1995), et deux médailles de bronze (1993, 1999) ;
- quatre titres de champion du monde par équipes en 1989 1991, 1993, 2000, et trois titres de vice champion du monde par équipes en 1983, 1985, 1987
- Un seul titre de champion d’Europe (1996) mais deux médailles d’argent (1982 ,1994) ;
- sept fois champion d’Europe par équipes (1986, 1988, 1990, 1992, 1996, 2000 ,2002) ;
- vainqueur de la coupe du monde (1990) et deux fois finalistes (1983,1996) ;
- sept fois vainqueur du top 12 européen (1984, 1986, 1988, 1989, 1993, 1995, 1996).
La légende dit que quand tu embrasses une médaille d’or olympique, elle se transforme en top-modèle de 24 ans aux yeux verts et aux cheveux blonds
La tête de file d’une génération suédoise incroyable avec les Mikael APPELGREN, Jörgen PERSSON, Erik LINDH, Peter KARLSSON, Jonny AKESSON, et autre Thomas von SCHEELE… Ils étaient beaux, ils étaient blonds, ils sentaient bon le top-spin chaud. Et ces derniers romantiques du tennis de table firent souffler un vent nouveau sur la planète ping. Qui décoiffa tout le monde, y compris (et surtout !), les Chinois, pendant une bonne décade. De leur premier titre de champions du monde par équipes en 1989, jusqu’au dernier en 2000. L’un des faits d’arme les plus glorieux : la première victoire collective contre l’équipe de Chine, en 1989. Jan-Ove y aura fissuré la grande Muraille et pour quelques années.
Mais la rumeur de ses exploits n’arrivait dans les chaumières qu’au compte-goutte. Pas de réseaux sociaux, pas d’internet, à l’époque. Et déjà rien à la télévision niveau ping. Il fallait attendre les comptes-rendus laconiques dans France Tennis de Table, avec de rares photos pourries en noir et blanc. Quelques vidéos circulaient sous le manteau, de vieilles cassettes VHS à l’image douteuse et tremblotante. Et on te racontait, qu’on t’avait raconté, que si, si, à un moment, Jan-Ove avait mis un point dingue, en défendant de dos, à 10 mètres de la table, à l’aveugle, la main gauche sur la séparation, contre Jean-Michel SAIVE…
Comment décrire le jeu de WALDNER? Pas facile. Car, il était le jeu... On a plus vite fait de faire la liste de ce qu’il ne sait pas faire au ping, que de ce qu’il pouvait faire. Oui, page blanche... Difficile de ne pas verser dans le superlatif. Excellent serveur. Excellent remiseur, un poignet incroyable, en chop courte ou en flip, dans toutes les positions. Premier démarrage solide. Contreur hors pair : ah, ses blocs coupés, ah, ses claquettes revers… Une capacité d’improvisation, d’innovation, de variations, de placements là où il fallait, quand il fallait. Surtout là précisément où l’adversaire ne l’attendait jamais... Quand la vie te semble maussade et triste, clicke donc sur Youtube et revisionne ses best-of ; ça reste le meilleur des anti-dépresseurs !
Alors oui, comme tous les génies et les grands hommes, il a sa part d’ombre et ses petits défauts et imperfections : une forme d’inadaptation à la vie en dehors du ping, une relative timidité expliquant une aisance médiatique moyenne, une tendance au petit boulard, avec l’arrogance et la suffisance des plus grands (mais uniquement réservée à ceux qui ont fait le grand chelem Champion Olympique/du Monde/et de la Coupe du Monde). Quelques addictions à la roulette, aux tripots, à la binouze, et au Mac do, expliquant ses deux valises de 10 kg en trop qu’il porte autour du bide actuellement… Mais la vie quotidienne n’est pas toujours simple quand tu es tout à la fois un Mythe et une Légende. Ses ailes de géant l’empêchaient parfois de marcher sur la terre des Hommes (oui, parfaitement, comme l’albatros de Charles BAUDELAIRE). Mais dès lors qu’il entrait dans une salle de ping, il respirait l’air ambiant, les déployait et s’envolait. Atteignant les sommets.
Petite anecdote : lors d’une compét dans les années 90, à l’issue d’un point exceptionnel de Jean-Philippe GATIEN, il était venu le féliciter et lui dire que c’était vraiment incroyable, et que cette balle entrait directement dans son top 10 des points les plus dingues qu’il avait vu dans le monde…Ce qu’il n’avait juste pas précisé c’est les 9 autres points, c’est lui qui les avaient marqués...
Si tu trouves qu’on ne lui pas encore suffisamment léché le derrière au cours de ce portrait, tu peux continuer, il existe également en timbre-poste !
Un grand merci pour tout Jan-Ove.
Merci d’avoir inspiré et donné envie à toute une génération.
Une génération de gros losers, certes. Mais tu auras eu le mérite de nous mettre des paillettes dans les yeux. Et des moulures au plafond de nos salles de ping.
Pour l’éternité.