Le blog amiénois du ping
Monsieur le Président,
Nous vous écrivons une lettre, que vous lirez peut-être, si vous avez le temps (merci pour l’intro Boris VIAN).
Juste pour vous signaler notre exaspération au sujet des nouvelles balles plastiques.
Elles seraient élaborées à partir de polymères issus des dérivés pétroliers. Mais nous on est maintenant certains qu’elles sont faites d’une autre matière : la matière fécale !!!
Car oui, les balles plastiques sont rondes. Mais comme des queues de pelles.
Oui elles sont solides. Mais comme le cristal.
Oui elles sont ultra-résistantes. Mais c’est dommage, leur espérance de vie est inférieure à celle d’un piéton marchant sur l’Autoroute A6 un 15 août. Leur obsolescence programmée avoisine parfois les 45 secondes, avec l’impression de jouer avec, et sur des œufs.
Oui elles sont sympas pour les matchs. Ce sont juste leurs rebonds qui défient les lois de la physique. Et leur bruit à l’impact équivaut, pour certaines marques, à celui obtenu en tapant sur une casserole.
Mais bon, le pompon, c’est leur prix. Car oui, elles coûtent la peau des fesses. Qu’on avait jusqu’alors fermes et rebondies. Désormais, on est sur liste d’attente pour une greffe cutanée.
Bref, des balles à deux balles. Ou plutôt à deux euros !
L’impression quand même, monsieur le Président, de s’être bien fait entuber. Le diamètre de notre sphincter anal n’est désormais plus celui d’une balle de ping-pong. Il a maintenant la taille des boîtes de 24 cm qui les contiennent.
Alors pourquoi nous avoir sevrés des balles celluloïd, qui nous biberonnaient depuis la plus tendre enfance ?
Pour des raisons obscures de développement durable, du caractère inflammable et potentiellement dangereux de cette matière, pour la fabrication et le transport des balles...Peut-être, mais alors pourquoi ces relents et ces rumeurs de conflits d’intérêts, et de gros business entre amis.
Et pourquoi s’être précipité, et nous avoir imposé une réforme alors que les fabricants sont encore incapables de fournir un produit de qualité, et de surcroît bon marché ?
Dommage que le capitalisme et le monde industriel se soient brutalement intéressés à notre petite discipline communiste. Le ping-pong, sport des campagnes et de la France d’en bas, populaire, et abordable financièrement. Jusqu’à ce que des firmes aient l’idée lumineuse de doubler le prix des revêtements caoutchouc. Avec maintenant le coup génial du passage aux balles plastiques. L’occasion rêvée pour les initiés et une poignée d’industriels, de se faire des balles, cette fois ci gonadiques, en or.
Le nombre de compétiteurs chute toujours plus. Mais bizarrement personne n’a jamais pensé à le mettre en perspective avec le coût du matériel.
Une discipline étrange que le ping-pong, sport individuel par excellence. Mais dans lequel la plupart des joueurs ne s’éclatent, et ne pensent, qu’à jouer en équipes. L’instinct grégaire et solidaire des pongistes, chaleureux et sympathiques. L’esprit rugby en fait, mais réservé à ceux qui ont de petits bras. Ce doit être pour ça qu’on nous impose désormais de jouer avec des balles plastiques ovales.
Alors pourquoi ne pas se rebeller, et se révolter contre ce scandale du plastic ball-gate ?
Justement parce que le pongiste est un être calme, docile, et non belliqueux. Comme un mouton. Les grands guérilléros, Emiliano ZAPATA et Che GUEVARA, n’ont eux jamais pu enchaîner deux tops. Mais caramba !, par contre ils savaient déclencher des puta madre de soulèvements populaires et de révolutions.
Alors on nous assure que les fabricants vont progresser. Que la qualité des balles plastiques va s’améliorer. Manquerait plus que ça… Tu imagines la firme BOEING faire la même à chaque fois qu’elle sort un nouveau 747 ? Bilan : un crash avec 524 morts chaque semaine… Mais bon, on vous assure : on bosse les gars ! Bientôt on vous vendra, mais toujours hors de prix, un produit parfait…
Pour le moment ils se contentent juste de produire un truc qui a la même qualité que ce qui sort de ton côlon sigmoïde tous les matins. Les alchimistes du moyen âge tentaient de transformer le plomb en or. Les fabricants de balles plastiques y sont parvenus. Mais encore plus forts : eux, c’est à partir du caca…
Alors oui, on passe notre petite colère. Parce qu’on se fait saigner par ces balles plastiques. Et parce qu’elles altèrent notre plaisir de jouer. Et notre porte-monnaie.
Et on peut vous dire, avec Paulot VERLAINE, que tout suffocant et blême quand sonne l’heure,
je me souviens des jours anciens. Et je pleure…
Ce temps maintenant révolu du celluloïd, des balles à la sphéricité presque parfaite, au contact doux et chaleureux. Au rebond régulier, et à l’impact soyeux. Avec lesquelles surtout tu pouvais jouer des heures. Et qui, une fois que tu les avais achetées, ne te laissaient pas en slip…
Bon, c’est sûr il y a plus grave dans la vie. Et dans le monde : la guerre, la famine, la misère, la peste, le choléra, Cyril HANOUNA, Jean-Marc MORANDINI... Tout cela ne reste après tout que du ping-pong. Et de petites balles plastiques.
Mais parce qu’il faut conclure, sachez, Monsieur le Président, que les spécialistes de la Hérain est mon royaume, avec Jacques BREL (vainqueur de l’Open d’Amsterdam), pissent comme je pleure, sur ces balles infidèles.
Veuillez recevoir nos salutations celluloïdesques les meilleures,
En comptant tout de même que monsieur Jean Michel SAIVE ravisse votre fauteuil. Et emporte les prochaines élections.
Pour qu’enfin, un jour, un dirigeant de l’ITTF pense un peu plus au jeu et aux pratiquants, qu’au business.